dimanche 2 janvier 2011

Les années noires


Les années noires

En littérature, comme au lit, l'on se fane avec les hivers sociaux de l'Histoire. Ainsi, vue du ciel de la mondialisation, la France, depuis vingt ans a empiré au jour le jour la qualité de son apport culturel, tout comme la liberté, les droits humains ont reculé dans une sinistre régression qui atteint un point critique dans nos jours.

Je parle vite ? Bon, vaut mieux que vous sommeillez et ne vous rendez pas compte de ce qui se passe. Si vous ne suivez pas, vous êtes sauvés, vous restez dans le jeu. D'ailleurs tout ça est venu parce que je veux vous parler de la douteuse différence d'écrire à la main chez certains, ou de le faire à l'ordinateur.

De prime abord, je suis reparti pour écrire "de la vraie littérature" à la main sur un cahier. Un moleskine, mais pas le premier, j'en avais cumulé plus d'une dizaine avant de découvrir les attraits du blog. J'en reviens à me détacher de l'ordinateur de plus en plus et passer à nouveau aux moleskine qui posent d'autres conditions d'écriture. D'en entamer un nouveau, après ces deux ou trois ans, m'a fait souvenir de la cérémonieuse ouverture du cellophane et la bande orange de ceux que j'achetais ou qui m'étaient offerts, je me suis souvenu que chaque fois je lisais souvent pour la sixième fois la notice, et même que je la lisais une fois en français, je la relisais en espagnol, anglais, italien et ainsi de suite. Mais en revanche je viens de faire un constat, je ne me souviens pas de ce que j'ai mis dessous la petite ligne fournie pour mon nom et adresse, dans la ligne "reward". J'ai la sensation que la première je l'ai remplie, mais en faisant le calcul d'une aumône, symboliquement. Après, comme je fume pour écrire, puisque ça décontracte et concentration et décontraction sont avec l'angoisse les grandes possibilités pour écrire bien, bon, avec la surprise un fou rire m'est venu à l'idée de ce qui ferait pour remplir la case "reward" quelqu'un comme NLR, je me demande même s'il n'a dû raconter par écrit ses réflexions.

Après je me suis dit, il faut pas se moquer des usagers de moleskine, moi compris, ce sont des pauvres dupes, des ingénus. Un peu le phénomène "bourgeois bohèmes", mais dans son avatar le plus émouvant, le plus digne de pitié.

Sachons qu'ils sont souvent des gens qui ont la sensation d'arriver tard à l'écriture, ou en tout cas des gens qui ont un respect presque religieux pour le produit "livre".

Je commence à vraiment prendre pour des cons les gens quand je ne suis pas sur du papier, l'écran me rend donc un peu plus rusé, plus tricheur. J'ai une plus grande facilité d'écriture (les fautes apparaissent soulignées et peuvent ainsi être corrigées, des nuances peuvent être ajoutées en parenthèse invisible) et une créativité accrue comme si je devenais président ou quelque chose d'immense. Mais toute la beauté est réduite au besoin de rencontrer des gens en tête à tête, sinon pour ce qui est du jeu littéraire je me désintéresse de plus en plus quand c'est un écran.

Dans toute culture l'art découle de la tension entre ce qu'on peut faire et ce qu'on ne peut pas faire. Rip, quand il a passé à l'atelier, m'a offert la possibilité de tourner avec une bonne caméra "quelque chose à l'atelier". Il a tout de suite ajouté "un documentaire et un entretien sur ta peinture", mais c'était trop tard, dans cette millième de seconde déjà au son du mot "tournage" une sarabande d'idées s'était installée dans mon imagination et ma boîte à pensées. J'ai même rêvé d'une orgie, dans l'interstice des deux phrases. Mais l'idée d'un cinéma klossowskien, une suite de tableaux vivants, qui est un de mes vieux souhaits, est montée en surface comme une bulle accélérée. J'ai pensé à mon Teatro de Azufre, que je suis en train de traduire avec l'aide de Marie-Agnès Michel, dans les conditions difficiles dans lesquelles nous trouvons la plupart de nous ici. J'ai vite réalisé la difficulté de construire une vraie mise en scène dans les conditions offertes par Rip, et par la situation. Mais je n'ai pourtant pas renoncé à un tournage expérimental d'une lecture à plusieurs voix, toujours ouverte à un apport plastique quelconque que je pourrais inventer, ne soit qu'une certaine manière de saisir "l'ambiance".

J'aimerais savoir si je ne suis pas parti trop loin, Rip.

Tu semblais sincère et j'ai été très touché de ta générosité.

Pour le café avec Nouchka et toi, Knight, tu peux me contacter par Rip ou par Cécile. Venez quand vous voulez.

Juline B, si tu veux venir poser comme on avait dit, c'est le moment, j'ai une commande de peindre une jeune femme qui fasse beau, débout et pas trop nue, et puisque ça va me sortir d'affaire pour un temps, je peux t'offrir une partie des esquisses pour ta collection d'art (fan art, en plus, puisque tu es dans le même cas de figure que Dahlia, chez laquelle dans le tableau se rejoignaient la belle jeune femme et l'amie écrivain, et qui était ouverte à poser pour un de ses "fans" entre les artistes). J'ai d'autres femmes en tête, pour cette commande, mais dans d'autres domaines romanesques qui n'appartiennent pas à la mouvance ELS. Dans ton mail tu disais oui au portrait, quand est-ce que tu peux venir ?

Je la lève pour que cette année soit explosive. Vive la littérature !!!

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