vendredi 24 février 2012

propos à 5 h du matt

Le rêve m'envoie en mission loin de Paris, ou pour mieux dire en bourse pour la création, dont ceci est peut-être le compte-rendu qui en était dû à l'institution philanthropique qui me l'a décernée. La capitale de l'Irlande était Porto ou Lisbonne, quelque chose comme-ça, portugaise, de ce côté de l'Atlantique, et suffisamment au Sud pour ressembler à plusieurs égards à Miami.

L'intérieur de la résidence ressemblait fortement au Musée Guimet, mais dans mes visites à la bibliothèque je voyais frustrée ma légère envie de lire ou de feuilleter. C'était pas de livres. C'était plus beau que ça. En marbrures de couleurs et plein d'inscriptions, il s'agissait des tombes d'un columbarium, avec même des accroches où des rares fleurs étaient fraîchement posées. Etaient-ce les livres mêmes ? les livres qui en avaient été incinérés ? On dirait cela du fait que d'autres artistes, pensifs, venaient "consulter" ceci ou cela, et demandaient parfois à s'asseoir, ou le petit escalier, à la bibliothécaire. Nous étions presque toujours à des étages qui plongeaient en gratte-ciel sur le port.

Nous passions les nuits soit dans les couloirs, à flirter et, très facilement, entre hommes et femmes qui ne pensions qu'à ça, et qui n'avions pas grande chose à nous dire, gavés de littérature internationale, art, et mode, nous toucher. Nous allions très tard dans un fumoir, en taxi, une espèce de limousine ou tenaient plein de nous, qui n'étions pas tellement nombreux.

La particulière innocence du vice, consistante à se sentir en état de délivrance par rapport à toute une série d'illusions, tromperies et anxiétés, rendait nos rapports d'une simplicité consistante à l'indifférence de la parole, l'ouvre-bouche de l'exhibition et le royaume des caresses jamais entièrement assouvies.

Au moment du réveil, avec une forte érection, une des artistes, qui louchait des yeux comme une Vénus hollywoodienne de série B, entre 30 et 40 ans, avait dénudé sa grosse poitrine, défait ses longs cheveux teintés blonds et laqués et sur le sol d'un couloir mal éclairé mais feutré et très chauffé, elle était toute nue avec un autre et moi, nous sollicitant chacun d'une partie du corps et respirant très fort dans le flou et les baisers à la chaîne.

dimanche 19 février 2012

réponse à une réponse à un commentaire


Chère Brigitte,

il y a bien, si l'on peut dire d'une "inquiétante étrangeté" qu'elle est bien ou qu'elle "y est", de la pensée freudienne dans les mélanges de mon atelier. Je crois même me souvenir que Freud en avait trouvé l'idée (eureka) en tant que touriste devant le Parthénon de l'Acropole d'Athènes... ce qui laisse encore plus songeur. J'avais entendu Jacques-Alain Miller, gendre de Lacan, mettre cette notion en rapport avec la difficulté de regarder la lumière, disons une lampadaire ou le soleil. Pour ce qu'il en est de la couleur on reste avec cela encore sur le champ des "connaisances" associées à la lumière, comme si elle était en même temps image et moyen de connaissance, mais aussi antithèse de l'inconnu, qui serait l'obscur qui avec elle donne sur une peinture la grisaille, le clair-obscur, et donc en conséquence, la possibilité du volume.

Alors, j'aimerais poser la question qu'on voit, pour ne pas chercher plus loin, à l'ouvre dans la profusion des couleurs "purs" ou pas, chez Vlaminck, sans pour autant je crois "vous le faire découvrir", puisque ce serait d'usurper cet ami têtu dont vous dressez le profil. Il y semble renoncer lui aussi à une superstition, celle du savoir-faire, duquel les avant-gardistes voulaient ne pas être dupés, pour plonger dans ce qui fait de ce que j'appelle superstition (aussi) une sauvagerie, un atavisme. Ce serait comme toujours une quête sans fin du passé, tout confondu par son infinitude avec l'avenir, pareils l'un et l'autre. Et puis il travaille encore, selon le précepte, et malgré son avant-gardisme, d'après nature. Il va faire jouer aux couleurs le jeu, la singerie, de nous redonner à voir un paysage. Il ne peut ignorer que sa peinture est l'équivalent du récit d'un bucolique; mais son pari est non pas tellement l'intensité ou la pureté, mais le jeu actoral des couleurs, leur personnalité qui dépasse et s'accouple au récit "bucolique", tout comme sur le poème, sur le fond de paysage, ce sont toujours les amours des faux bergers et des fausses bergères qui vont circuler, dans le temps, dans l'espace, et en dehors d'eux, dans un cercle vicieux qui ne peut que nous fasciner et nous emporter en sarabande, nous amener à la répétition, n'est-ce pas ?

Chère Brigitte, je vous prie d'excuser l'épaisseur de la couche que je viens de mettre sur votre commentaire au fauvisme.

Amitiés.

vendredi 17 février 2012

morceaux fragmentaires ou commentaires

Oui, en effet, une des questions que vous m'aviez posé, me voyant peut-être changé (?), avec Alexandra Varrin dont je venais de serrer la main et qui était à votre côté, et peut-être la question la plus concrète et générale en même temps qu'on pusse me poser dans une soirée littéraire, a été si j'étais amoureux.
Je me disais entretemps que l'écriture partage avec le triste artisanat du peintre un certain trait idolâtre, toute écriture entraîne un regret, on ne peut que regretter d'avoir écrit. Mais le lendemain je disais à une amie écrivaine qui n'avait pas pu assister à la soirée que le fait que dans l'idole de la lettre ce soit la parole qui est logée permet une certaine légèreté, une délivrance proche de celle propre au prophète.
Sinon, en effet, il me semble intéressant le contraste entre cette ambiance axée sur le transfert platonique et l'extérieur français dans sa noirceur qui se fout de la traditionnelle et discrète grisaille. C'était l'amour qui tenait séance et souffle. Ce fut votre sempiternel commentaire sur ce qu'on ne comprend pas ce que j'écris et ma traditionnelle réponse, comme si nous devions toujours nous dire la même chose. Mais sous le regard étincelant d'Alexandra, à laquelle je répétais la même chose que j'ai répétée aux différentes écrivaines rencontrées durant cette heure au Bedford, c'est à dire, je me suis présenté comme peintre et comme fan, et j'ai précisé partout que ma pratique du portrait à l'huile ou au crayon était du fan-art. Je retiens le nom aussi de Claire Berest et de Geraldine Barbe, et le fait d'avoir parlé avec une biographe de Poe et Baudelaire qui me regardait comme si je dépassais le domaine possible d'étude quand j'ai ramené tout de suite la conversation à la supériorité du chanvre sur le vin. Mon regret en est là, cette conversation ratée par une délicatesse symétrique. Elle semblait prendre, comme il en arrive souvent aux anglo-saxonnes avec les latinos, la courtoisie de l'hispano par de l'harassment, hélas... D'ailleurs son livre m'aurait intéressé.
Si elle lit ce commentaire, je voudrais qu'elle regarde, en cliquant sur le lien, mes petits exercices de traduction d'après Shelley.
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Encore plus ridicules que la superstition sont les démarches prétendant l'abolir pour longtemps. Dans ce qui touche la peinture et la couleur, je pense à la précarité psychique dans laquelle se placent tous ces peintres qui ont prétendu fonder sur les maigres constats des sciences officielles leur rapport aux couleurs. C'est de la mortification; et je ne vois aucune différence d'avec les pénitences des superstitieux. Ou les autres qui ne font que se réclamer des retrouvailles d'avec l'enfance, et qui rappellent la sourdine du prédicateur le plus ignare. Mais j'en sais rien, et je m'excuse de déplacer la discussion. Je viens de faire connaissance, et c'était aussi de ma part une "notation".





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Déjà qu'on apprend à éviter de se projeter sur des figures prétendument héroïques, dont Napoléon pour ne mettre que l'intonation folklorique la plus douce, qui s'avèrent être des génocides, la question se pose de toutes nos autres projections (Poe, Baudelaire ou Picasso, Dali... jusqu'à chercher les Pierres, Klossowski, Molinier, etc) et là, j'aimerais faire remarquer que ce n'est que le jeu pivotal du récit qu'on se transmet "régulièrement", et des hauts et des bas sur le débit projectif, qui peut venir une issue à ce qui menace le quelque peu de clarté de pensée et de parole qui nous est dû. Bonjour, madame.

Le purgatoire (5 ou 6) poursuite de Shelley



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Poursuivons l'interprétation de la partition anglaise :

Sautons, sautons des pages :


And down the streams which clove those mountains vast,

Around their inland islets, and amid

The panther-peopled forests, whose shade cast

Darkness and odorous, and a pleasure hid

In melancholy gloom, the pinnace past;

By many a star-surrounded pyramid

Of icy crag cleaving the purple sky,

And caverns yawning round unfathomably.



Et la chute des tendances adhérentes et structurantes des grandeurs des montagnes,

l'eau de la tendance à l'intérieur des surfaces, archipel et parmi

les brousses peuplées des panthères, dont l'ombre gagne

en noirceur et en parfum, et un plaisir enfoui

dans la mélancolie de l'accomplissement, statuette et bagne;

par plus d'un symbole enneigé de la terre et le ciel en feu, glacis

du froid innouï dont la tendance adhère et pénètre le bleu et le rouge,

et les grottes s'ennuient autour, inscrutables.


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samedi 4 février 2012