mercredi 26 mai 2010

planche contact 671 d'Eve

*

courbes sont les phrases qui dépassent l'horizon

le merle émergeant, l’oiseau barbu si j’ose

est le premier qui chante, quand dort l’enfant

encore, et l’ivrogne a le pincement du regret

il est sans couleur comme l’heure de son chant,

longuement le soufi dans l’encre du merle

prisonnier du coffre de l’heure

a cherché ses clés par les ailes de feu de l’ivresse

je suis tombé sur cela dans ton volume d’Attar sur l’oiseau

alors les plumes de ténèbre indécentes de la lettre

de la pitié hypocrite qui arrive en premier

le haut-parleur du désespoir qui se fait l’entendu

qui vole d’une tuile à un échafaud d’antenne

qui ne connaît pas d’autres aigles que les aigles mourants

de ses mensonges matinaux

*

planche 671

alors le merle est persistant comme moi

il chantait avant les nonnes devant l’Alhambra

et il chantera à notre toit entrouvert de la ville de Paris

avant que je sois capable d’expliquer le philtre

de contradictoires sentiments et moments

la syntaxe insaisissable des photos de quelque chose

toujours justes et solitaires, même dans l’amour et l’amitié,

c’est un rouleau complexe et personnel

comme un poème

1-5

pour un mannequin patriotique, telle une amazone,

une Penthésilée du suicide, une beauté derrière une vitre,

à New York, puis tu es chez ta famille

6

à ton oncle et ta tante habillés pour la visite

7

succèdent des verres à champagne flous et laiteux

involontaires et surnaturels

pour, ensuite 8

sur paysage aimer ta grande-mère dans un portrait

suivi du portrait de ta maman 9

qui pose presque en trois quarts

suivi de deux prises innocentes de narcisses

10-11

quand même savantes dans la valeur mystique

du blanc et noir et du cadrage

ensuite quelqu’un

12-16

sur le dossier est écrit 1991, Jacques, et d’autres

s’agit-il d’un bar de France ou d’Espagne ?

17

pagode à argile et à chaux

fronton grec dans mon chemin vers l’école

l’Ecce Homo privé d’une vieille façade de la Placeta del Abad

si près du ciel et languissant

pâleurs du tableau

géométrie du soleil et de l’ombre de l’été

18-21

la vision conventionnelle de l’Alhambra

depuis le Mirador où se trouvait mon école primaire

c’est là, devant ces quatre clichés archaïsants qui refusent

le rouge, le bleu et le jaune

que j’allais rendre mes devoirs et recevoir des coups

c’est là que la chimère de la connaissance

palais anodin de la célébrité et de l’art

Alhambra encore jeune, toujours jeune

elle m’a enfermé dans la prison

d’une tour d’ivoire et de délice solitaire

elle m’a fait regarder les mortels

avec le mépris de l’enfant

dont les pensées sont secrètes comme une arabesque

ou comme le trésor d’un fantôme

22-24

Hollande, portrait d’un jeune ami, A.

au physique sensuel du Maroc et au sourire

fronçant d’imprévu la tête

tannée d’un dieu qui voyage et qui s’offre

au moment présent occupant un poste important

et mondain et cultivé, attentif au plus intime, et discret

sans rigueur, aimant les femmes jolies et aléatoires

de l’état et de l’amitié sagement réchauffée par l’illusoire

comment ne pas voir le présent dans un portrait d’un jeune homme ?

ça se passe au bord d'un canal et des maisons d'Amsterdam

26-27

fleurs de géranium

bataille de paix et de plaisir

qui te précède

28

tu sembles amoureuse

coudes soulevés, mains aux longs cheveux,

volupté, sourire

formellement contrastée mais harmonieuse

29-31

trois portraits de Z.

heureux sous ton regard

clair-obscur d’aristocrate

32-33

deux portraits de ta grande-mère assise

qui retient un chat distrait

photographies qui ressemblent déjà à des dévotions funéraires

et dont tu en as tiré une pour notre écritoire

34-37

dans le jardin

le chat pense et joue

aux dés

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