samedi 17 juillet 2010
bouquiniste
Je peux parler de ce que je fais à présent, comme oeuvre, c'est à dire le dessin. Je dessine comme j'ai dessiné aussi quotidiennement à Grenade. Mon arrivée à Paris, avec des intermittences en Espagne où j'exerçais de préférence le grand tableau à l'huile, avait depuis 2004 été marquée d'abord par le moyen format à l'encre de Chine. Et ce n'était plus pour moi du même ressort que le dessin, c'était quand même au pinceau, je pouvais couvrir, voire diluer, comme parfois, dans de l'eau, dans du lait, dans du thé ou jus de fruits, l'encre.
C'est après la Semana Santa à Grenade, que, cette année, de retour à Paris, j'ai commencé à balancer des quantités de dessins nocturnes sur ce blog. Dans un passage du côté de Saint Germain des Près, en discutant avec une amie de passage à Paris et en prenant un coca-cola au citron (j'ai découvert grâce à elle que la longue cuillère était pour étriper un peu la tranche de citron), donc, amie écrivaine et peintre (tout comme moi), qui était spécialiste en Qi Gong et médecine traditionnelle chinoise, la question d'une séance s'était posée. Elle m'a avertit qu'elle travaillait des cures au feu, une branche des soins en Chine qui demande beaucoup d'adresse et surtout qui laisse des traces dans le corps et qui est très douloureuse. Nous avons échangé des cadeaux pris au chemin, elle m'a offert un tout petit bibelot chinois qui me regarde à présent attentif pendant que j'écris et de l'engrais pour les rosiers, je lui ai offert un livre vendu à même le sol par un maghrébin (un volume de peinture érotique chinoise en fait) lequel j'avais aperçu à Saint Michel dans une confusion pilonable déposée par terre, depuis le bus, à l'allée, me disant que c'était pour elle. La cure au feu. J'ai pensé à cette fureur du dessin dans laquelle je me trouvais et je lui ai dit que puisque le feu éveillait, j'avais besoin à présent de m'endormir, de m'engourdir, de ralentir. Pour l'été, du moins. Peut-être une condition pour retourner à la couleur, je sais pas. Mais j'ai vérifié que ça se passe déjà au cours de la nuit, quand l'aube approche. L'aspect foncièrement intellectuel des dessins de minuit jusqu'à trois heures commence par la suite à devenir plus physique à cause de la tendance à s'endormir.
J'ai dessiné cette autre femme (sujet peut-être de récit, mais pas ici) que vous voyez sur l'image, autour des cinq heures du matin, et elle anticipe la stylisation propre à la fatigue, tout en gardant l'acuité requise pour la transposition du souvenir. Je sens revivre la vision, encore.
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