jeudi 8 mai 2008

Au fil d'un petit concert de Zsuzsanna Varkonyi


Demain à deux heures de l'après-midi je suis censé faire un portrait. C'est cinq heures. Je viens d'un petit concert de musique tzigane aux Trois Arts, par Zsuzsanna Varkonyi, accompagnée par moments d'Awena Burgess. Pas d'autres musiciens. Une femme seule au chant scintillant, enflammé, qui se projetait, ardente comme un papillon du soir brûle entre les larmes d'un lustre illuminé, avec un accordéon qui semblait immense, tellement Z.V. est mince et subtile. Son échelle a bien des octaves, l'héritage tsigane a peut être des choses à voir avec les théories de Roy Hart sur ce mystérieux dieu mineur, Abraxas, qui permettait de couvrir les huit octaves avec la voix. Je me suis dit que j'aimerais parler d'elle. J'écoute son disque "Valahol" et je me suis rendu compte que le meilleur hommage que je pouvais faire aux émotions éprouvées au concert c'était d'enfin traduire mon conte sur ma grand-mère écrit il y a deux ans pour mon fils.

Soit dit au passage, le jazz comme musique propre aux noirs a mis du temps à gagner les élites. Que ne serait-il de la musique bohème qu'on entend jouer dans les coins et les wagons de métro aux mendiants ?

Mañana a las dos del mediodía se supone que debo pintar un retrato. Son las cinco de la mañana. Vengo de un pequeño concierto de música zíngara en les Trois Arts, por Zsuzsanna Varkonyi, asistida por momentos por Awena Burgess. Sin más músicos alrededor. Una mujer sola con su canto incendiado que se proyectaba, ardiente como una falena en un candelabro, con un acordeón que parecía inmenso, tanto Z.V. es delgada y sutil. Su voz parece tener bastantes octavas, la herencia gitana debe guardar alguna relacion secreta con ese dios menor, Abraxas, que segun Roy Hart hacia alcancar al cantante las ocho octavas. Me he dicho que querría hablar de ella. Escucho su disco "Valahol" y me he dado cuenta de que el mejor homenaje que podía hacer a las emociones sentidas en el concierto era por fin traducir mi cuento sobre mi abuela escrito hace dos años para mi hijo.

Dicho sea de paso, el jazz como música propia a los negros tardó su tiempo en ganarse a una cierta élite. ¿Qué no será con la música bohemia que escuchamos tocar en las esquinas y en los vagones de metro a los mendigos?

J'inclus de même un portrait de mon amie Patience Tison, puisque c'est avec elle et ses amies que ma compagne Eve et moi avons assisté au concert. Huile sur toile de un peu plus de un mètre de coté. Photo: Eve Livet.

Incluyo igualmente un retrato de mi amiga Patience Tison, ya que es con ella y sus amigas con los que mi compañera Eve y yo hemos asistido al concierto. Oleo sobre tela de algo más de un metro de lado. Foto : Eve Livet.


La frontière du Portugal

Pendant la guerre de l'Espagne, une jeune fille sans argent, avec sa mère en prison et son père caché sous un meuble, apportait du sucre et du café en Espagne en passant par la montagne pendant la nuit venant du Portugal. Avec ce sucre et ce café elle tirait à peine le nécessaire pour toute la famille. Dans sa course aveuglée par les rochers, elle portait ce qu'elle allait vendre dans un sac avec un trou.
Le froid lui fouettait le visage, et elle connaissait l'existence des loups dans la montagne. Soudainement il lui sembla qu'on entendait dans l'obscurité une musique éteinte de piano. Comme d'un musicien qui s'essaie pour un futur concert. Les loups écoutaient la musique, sur les volumes de la roche, assis en chaises de noyer, et une louve étendue sur un divan de velours abîmé fumait avec un porte-cigarettes, comme les grandes espionnes et les actrices du cinéma muet.
"Ici vient le café", a entendu la jeune fille juste derrière elle. Elle était au centre d'une grande ville de loups. Ils avaient mis une lucarne très haut avec des affiches pleines de mots et des drapeaux de couleur rouge, et d'autres qui étaient de purs linges de lit mal lavés et déchirés qui avaient été mouillés de larmes. On lui tendait une patte, lui demandant discrètement qu'elle laisse le sac au pied de la petite cantine à pétrole, et une louve sortit la boite de café qui était dans le sac et remplit une cafetière en argent, noircie, mais qui brillait avec la lune.
Pendant que le feu se mettait à chauffer l'eau, la jeune fille entendit qu'on lui demandait : "Et toi, tu t'appelles comment ?" Elle dit Etelvina, mais ne dit pas son nom de famille. Les loups tendirent les tasses, quand le café fut prêt, et demandèrent du sucre. Alors la louve fit geste à Etelvina qu'elle sorte le sucre du sac. Mais il était tout sorti par le trou du fond. "Tu dois aller le chercher", ils lui ont dit, "mais pour que tu ne nous dénonces nous allons te bander les yeux". Ils lui mirent un bandeau sur les yeux et Etelvina prit la route qui descendait la montagne.
Elle se demandait comment elle allait faire pour cueillir le sucre, elle savait que les loups attendaient pour prendre le café et qu'elle devait agir vite.
"Etelvina Diaz Gonzalez", elle entendit crier du bas de la montagne, "tes voisins t'ont dénoncée pour contrebandière, rends toi à la Guardia Civil ou nous tirons". Elle n'arrivait pas à enlever le bandeau et ne voyait par où elle marchait, mais elle savait que si elle se rendait personne ne prendrait soin de son père caché ni de ses petits frères. Soldats et guardias civiles se communiquaient leurs places avec des trompettes et sifflets et se mettaient à tirer sans attendre réponse.
Le Destin apparu à Etelvina évanouie sous les traits de sa mère Isabel, emprisonnée dans la prison politique de Ciudad Rodrigo. "Me voici, ma fille, pour t'aider. Ces loups qu'y a dans la montagne descendront tuer tous les soldats si je leur ordonne. Mais comment leur faire parvenir le message ? Ma fillette, ne désespère pas, parce que tu vivras beaucoup d'années, tu verras tes petit-fils et quelque arrière petit fils, et tu verras des temps nouveaux. Nostradamus, le prophète, dans un de mes livres, dit que les femmes en Espagne porteront des pantalons, et cela ne peut arriver que quand il y aura de la liberté et moins de Guardia Civil. Tu devras t'armer de patience. Apporte le sucre aux loups. Ils feront tout."
"Mais, maman, comment est-ce que je vais retrouver le sucre qui s'est dispersé tout au long de la montagne ? Il fait nuit, j'ai les yeux bandés et cela semble une tache impossible. Dis-moi, toi qui est amie des gitans et qui peux guérir par la vertu de la magie, quelque prière ou bénédiction qui me fasse retrouver notre sucre."
"Ne sois pas ingénue, fillette", continua à dire l'apparition sur le point de disparaitre, "les saints du ciel sont superbes et n'écoutent que le son de l'or, ce n'est pas nécessaire de prier, tout est fait par la Nature. Prends ce canif, ôte ton bandeau, et cherche quelqu'un de vraiment humble qui t'aide".
Etelvina pleurait parce que jamais elle ne pourrait trouver personne de plus humble qu'elle, qui vendait pour une misère le café qu'elle même ne pouvait pas se permettre de boire, et qui était si dépourvue de ses parents, chargée de ses frères petits, et qui à présent avait peur non seulement des loups, mais des voisins malveillants.
Quelques balles continuaient de siffler dans l'air et Etel se jeta par terre et, pleurant, elle se replia de plus en plus à ras du sol vers la montagne, en direction du Portugal. Quelque chose la démangeait dans le ventre et puis lui montait dans le dos. C'était une fourmi. "Tu es peut-être vraiment humble", pensa Etelvina. "Humble et pas humble, chère Etel", lui répondit la fourmi, "parce que avec mon peuple entier en peu d'heures nous avons beaucoup profité de toi". Etelvina dit qu'il ne lui était pas présent que des êtres aussi menus aient fait ou puissent faire sur elle le moindre dommage. La fourmi se mit à marcher et amena Etelvina au fourmilier. "Soulève cette pierre". Etelvina trouva sous la pierre un tas colossal de sucre, que les fourmis avaient peu à peu réussi à ramener tout au long du chemin, et elle remplit la poche de son tablier.
Du coté portugais de la montagne elle atteignit la ville des loups, qui étaient là à attendre avec leurs tasses de café, l'oreille attentive encore à l'essai musical.
"Servez-vous le sucre, je l'apporte dans mon tablier. Maintenant, prenez vite le café et venez m'aider à arriver où se trouvent mon père et mes frères". Ils prirent le café et lancèrent des hurlements qui firent se dresser tous les cheveux des soldats qui étaient dans la vallée. Puis le piano joua très fort, une oeuvre qui semblait presque dodécaphonique, en tout cas très avancée dans le temps, et qui sembla à Etelvina composée par Nostradamus même. Elle pensa qu'elle verrait des temps nouveaux, qu'elle vivrait longtemps et qu'elle n'oublierait ces loups, quoique elle doive vivre une vie de fourmi dans une ville de loups, lointaine, en tant qu'exilée.

A ma grand-mère et à mon fils.

La frontera de Portugal

En la Guerra de España, una muchacha sin dinero, con su madre en prisión y su padre escondido debajo de un mueble, traía azúcar y café a España pasando la montaña por la noche desde Portugal. Con ese azúcar y ese café sacaba apenas lo necesario para toda la familia. En su caminar a ciegas por las rocas, llevaba lo que iba a vender en un saco con un agujero.
El frío le azotaba la cara, y ella sabía de la existencia de lobos en la montaña. De pronto le pareció que se oía en la oscuridad una música apagada de piano. Como de alguien ensayando para un futuro concierto. Los lobos escuchaban la música, en unos peñascos, sentados en sillas de nogal, y una loba recostada en un diván de terciopelo estropeado fumaba con boquilla, como las grandes espías y las actrices de cine mudo.
"Aquí llega el café", oyó decir la muchacha justo detrás de ella. Estaba en medio de una gran ciudad de lobos. Habían puesto una farola altísima con carteles llenos de palabras y con banderas de color rojo, y otras eran puras sábanas mal lavadas y rotas que estaban mojadas con lágrimas. Le tendieron una pata, pidiéndole discretamente que dejase el saco al lado de la cocinilla, y una loba sacó el frasco del café que estaba en el saco y llenó una cafetera de estaño, que brillaba con la luna.
Mientras el fuego iba calentando el agua, la muchacha oyó que le preguntaban: "Y tú, ¿cómo te llamas?". Dijo que Etelvina, pero no dijo su apellido. Los lobos tendieron las tazas, cuando estuvo listo el café, y pidieron azúcar. Entonces la loba hizo gesto a Etelvina de que sacase el azúcar del saco. Pero se había salido toda por el agujero del fondo. "Debes ir a buscarla", le dijeron, "pero para que no nos delates te vamos a vendar los ojos". Le pusieron una venda en los ojos y Etelvina echó a andar montaña abajo.
Se preguntaba cómo iba a hacer para recoger el azúcar, sabía que los lobos estaban esperando para tomarse el café y que debía actuar rápido.
"Etelvina Díaz González", oyó gritar desde el pie de la montaña, "tus vecinos te han denunciado por contrabando, entrégate a la Guardia Civil o dispararemos". Ella no conseguía quitarse la venda y no veía para dónde iba, pero sabía que si se entregaba nadie cuidaría a su padre escondido ni a sus hermanos pequeños. Soldados y guardias civiles se indicaban las posiciones con trompetas y silbatos y empezaban a disparar sin esperar respuesta.
El Destino se apareció a Etelvina desvanecida bajo los rasgos de su madre Isabel, presa en la cárcel política de Ciudad Rodrigo. "Aquí estoy, hijita, para ayudarte. Esos lobos que hay en el monte bajarán a matar a los soldados si yo se lo ordeno. Pero, ¿cómo hacerles llegar el mensaje? Hijita, no desesperes, porque vivirás muchos años, verás a tus nietos y a algún bisnieto, y verás tiempos nuevos. Nostradamus, el profeta, en uno de mis libros dice que las mujeres en España llevarán pantalones, y eso sólo puede pasar cuando haya libertad y menos Guardia Civil. Tendrás que armarte de paciencia. Lleva el azúcar a los lobos. Ellos se encargarán de todo."
"Pero, mamá, ¿cómo voy a poder encontrar el azúcar, que se ha ido derramando por toda la montaña? Es de noche, tengo los ojos vendados y parece tarea imposible. Dime tú, que eres amiga de los gitanos y que puedes curar con la virtud de la magia, algún rezo o bendición que me haga recuperar nuestra azúcar."
"No seas ingenua, hijita," seguía diciendo la aparición a punto de desaparecer, "los santos del cielo son soberbios y sólo escuchan el sonido del oro, no es necesario rezar, todo lo hace la Naturaleza. Toma esta navaja, quítate la venda, y busca alguien realmente humilde que te ayude."
Etelvina lloraba porque nunca podría encontrar a alguien más humilde que ella, que vendía por una miseria el café que ella misma no podía permitirse tomar, y que estaba tan desprovista de sus padres, encargada de sus hermanos pequeños, y que ahora no sólo tenía miedo de los lobos, sino de los hombres del valle y de los malintencionados vecinos.
Algunas balas seguían silbando en el aire y Etel se tiró al suelo y llorando se iba replegando a rastras más hacia el monte, en dirección a Portugal. Algo le picaba en la barriga y luego le subía por la espalda. Era una hormiga. "Quizá tú eres realmente humilde", pensó Etelvina. "Humilde y no humilde, querida Etel," le respondió la hormiga, "porque con mi pueblo entero en pocas horas nos hemos aprovechado de ti". Etelvina dijo que no le constaba que seres tan diminutos le hubieran hecho o le pudieran hacer ningún daño. La hormiga se puso a andar y llevó a Etelvina al hormiguero. "Levanta esta piedra". Etelvina encontró debajo de la piedra un montón colosal de azúcar, que habían ido trayendo las hormigas por el camino, y se llenó el bolsillo del delantal.
Por la ladera portuguesa de la montaña alcanzó la ciudad de los lobos, que estaban esperando con sus tazas de café, escuchando todavía el ensayo.
"Sírvanse el azúcar, la traigo en el delantal. Ahora, tómense pronto el café y vengan a ayudarme a llegar a donde están mi padre y mis hermanos." Se tomaron el café y lanzaron unos aullidos que empezaron a poner los pelos de punta a los soldados que estaban en el valle. Después el piano tocó muy fuerte, una obra que parecía casi dodecafónica, en todo caso muy avanzada en el tiempo, y que a Etelvina le parecía compuesta por Nostradamus. Pensó que vería tiempos nuevos, que llegaría a muy vieja y que no se olvidaría de estos lobos, aunque viviese una vida de hormiga en alguna ciudad de lobos lejana, de exiliada.

Dedicado a mi abuela y a mi hijo.

6 commentaires:

Alfaraz a dit…

Tengo que reconocerle que me ha gustado mucho este cuento familiar que nos ha escrito.
Claro, que puede ser porque es el primer texto que le he entendido.
Tendré que dedicarle más tiempo.

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Manuel Montero a dit…

Pero, lo ha leido en frances o en espanol ? Gracias en todo caso. Si le interesa mi parte "inteligible" hay libros a la venta en el vinculo Mon éditeur que es la editorial Meligrana. En el blog en realidad estoy colgando mi parte mas esoterica, dejando aparte como ha visto cosas como este cuento.

Alfaraz a dit…

En español, desde luego. Desgraciadamente no domino la legua de Molière; me domina ella a mí.

Editor veo que ya tiene ¿y galerista? ¿Ha expuesto en España alguna vez? ¿Y en Francia?

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Manuel Montero a dit…

Mister Alfaraz, mi curriculum se puede consultar en el vínculo artprice (ma vitrine peinture) pagando una suscripción módica por la información. Eso es como una señora que me preguntó ¿pero de qué vive usted? Del aire, le respondí, ¿No lo ve? Como todo el mundo.

Alfaraz a dit…

Jajaja...
Afortunadamente hace tiempo que soy socio de Artprice.

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IZQUIERDO a dit…

Entrañable cuento Manuel, J´ai lu le conte dans la langue de Molière tirando de vez en cuando de la Cervantina.


Aun por Burdeos, viviendo una vida de hormiga, aunque creo que aqui no hay lobos, asi que estoy pensando en mudarme dentro de poco tiempo y seguir viviendo del aire, como todo el mundo jeje.

Enchanté de te voir et lire, comme toujour.