samedi 9 juillet 2011
Sur Dante V (Vénus)
Ou bien cet envol au Ciel de Vénus… Il semble que Dante n'a pas grand chose à dire sur l'amour, vraiment. Il remarque, qu'en entrant, Béatrice semble "un peu plus belle". Ah, oui ? C'est tout ? Franchement, on peut dire que le Paradis coupe les ailes. Bof, qu'on enlève les ailes à la mouche, ou qu'on les enlève au papillon, le résultat est le même. Sauf que Dante est bien plus cette mouche dont l'envol jusqu'à Dieu caractérise les religions orthodoxes. La puanteur des queues petites malpropres. Il est magnifique, dis-donc, côté connerie, Dante. Lisez les subtilités qui l'occupent en plein atterrissage sur Vénus. Si les fils ressemblent aux parents, vieille dispute légale dans l'administration des malédictions et des vendettas, dont même Jésus reprend la discussion. Mais bon, c'est pas le meilleur de l'Italie, et encore moins de Vénus… Le Pape ferait bien de canoniser Dante, puisqu'il est avéré avoir un libidogramme plat. La façon dont il lâche ses vers… je sais pas, j'aurais besoin qu'on me fasse un massage ou une fellation synchronique pour les trouver poétiques. Sinon, je m'emballe quand-même et j'ai peur que mon écriture tout à fait fébrile et inconsistante soit un exercice du même ordre que la fébrile et inconsistante critique "oedipique" par laquelle Onfray, le comble du non-lieu intellectuel français, prétend "démystifier" Freud. La seule explication que j'arrive à me donner est que tout grand classique littéraire, par sa multiple fréquentation, dévient "collant" pour la pensée ou en tout cas déchaîne des propriétés "collantes" dans les pensées disposées par la fièvre. Et qui n'a pas traversé la fièvre, surtout en France ? Je songe au Livre Hébreu d'Enoch, aux différentes révélations barbélo-gnostiques et valentiniennes de Nag Hammadi, et même en étant des créations pour ainsi dire embryonnaires, non littéraires, avec un je ne sais quoi d'amateurisme, je les préfère à Dante. On a de la marge pour jouir de ce qu'on lit. La question qui se pose est la nécessité de magie pour accéder à une certaine beauté, voire légèreté. Dante est tellement étroit, tellement lourd…
Voyons un petit poète tel Salomon Ibn Gabirol, qui dans son Kether-Malkhout (une petite Divine Comédie juive), parle plus juste à propos de Vénus, sans sortir de la solennité requise pour ce genre de voyage.
Tôt le matin, à fumer à la fenêtre, j'aperçois d'autres voisins qu'en font de même aux fenêtres du bâtiment d'en face. La réalité qui ressemble progressivement à l'asile. Et je me dis qui si j'avais une autre chance de lire le même passage de Dante je pourrai dire toute une autre chose que ce que je viens de dire. Une aversion acquise envers Dante me fait penser que la seule vertu de la Comédie est son argument même, qui amène forcément à écrire "grand". Tout ce qu'on écrit sur le Ciel est fatalement profond, quoi qu'on dise. Un fanatique islamiste à l'époque des massacres en Algérie avait dit, par exemple, "la vérité est une plante, et elle pousse au Paradis", pour justifier le suicide en exercice du terrorisme. Et bien, dans l'état neurasthénique où je me trouvais à l'époque, en lisant cela dans le journal, cette pensée me parût dramatiquement profonde, de par sa puérile violence, de par sa minutie et son précieux pour le mensonge, de par l'innocence paradoxale du mensonge. Tout ça est inhérent au Paradis. Lire le Tetrabiblos de Ptolomée en écoutant Edgar Varèse, c'était aussi dantesque et il faudrait envisager comme-ça une approche de Dante. Tout ce qui est bizarre et surfait dévient naturel si l'on s'applique au Ciel. Sinon l'aversion acquise dont je parle est motivée non pas par un réel dégoût, si n'est celui de la religion, qui n'est qu'un dégout épidermique et politique, sans aucune valeur pour le grand art, mais par la sympathie qui a m'a suscité un petit essai de Gombrowicz et une réflexion d'Italo Calvino. Ce dernier faisait voir que Guido Cavalcanti, contemporain de Dante, est beaucoup moins lourd…
(ça continue encore, ma psychanaliste insiste sur ce que ça peut devenir un livre... donc cliquez)
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